BIOBIBLIOGRAPHIE
Yvon le Men est né en 1953 à Tréguier. Depuis son premier livre Vie (1974), écrire et dire sont les seuls métiers d’Yvon Le Men. Il est l’auteur d’une œuvre poétique importante (éditée chez Rougerie et chez Flammarion) à laquelle viennent s’ajouter des entretiens, six récits et deux romans (publiés au Seuil et chez Flammarion)
A Lannion où il vit, il crée, en 1992, les rencontres intitulées « Il fait un temps de poème ». Etonnant voyageur, il travaille au festival du même nom et de Saint-Malo à Bamako, de Sarajevo à São Paulo, il se fait le passeur des poètes et des écrivains. En 1997, il y crée un espace poésie. De 2006 à 2008, il a publié une chronique hebdomadaire dans le journal Ouest-France : « Le tour du monde en 80 poèmes ». Ses textes, livres ou anthologies, sont traduits dans une quinzaine de langues.
Par ailleurs, depuis de nombreuses années, il travaille dans les écoles, avec les enfants.
PRINCIPAUX TITRES DISPONIBLES:
Récits, Nouvelles :
- Existence marginale, mais ne trouble pas l’ordre public ( Flammarion, 2012)
- Mes demeures en Bretagne ( Naïve , 2012)
- Besoin de poème : lettre à mon père (Seuil, 2006)
- Le château sous le ciel ( photographies Yvon Le Marlec) Filigranes 2005
- On est sérieux quand on a dix-sept ans (Flammarion, 1999)
- La clé de la chapelle est au café d’en face (Flammarion, 1997)
- Le petit tailleur de short (Flammarion, 1996)
Romans :
- Si tu me quittes, je m’en vais (Flammarion, 2009)
- Elle était une fois (Flammarion, 2003)
Poésie :
- En fin de droits ( illustrations de Pef) éditions Bruno Doucey 2014
- Il fait un temps de poème, tome 2 (Filigranes, Mars 2013)
- Sous le plafond des phrases ( Editions Bruno Doucey, 2013)
- A louer chambre vide pour personne seule ( Rougerie, 2011)
- Le point J ( illustrations Jeanne Frère) ( coédition Chant Manuel et Aedam Musicae , 2011)
- Le Tour du Monde en 80 poèmes (Flammarion, 2009)
- Vingt ans – Poèmes 1971 - 1976 (La Passe du Vent, 2009)
- Chambres d’écho ( Rougerie, 2008)
- Le loup et la lune (Rougerie, 2001)
- Le jardin des tempêtes (Flammarion, 2000)
- L’écho de la lumière (Rougerie, 1997)
Jeunesse :
-Douze mois et toi (Éditions Milan, 2005)
Entretiens :
- La langue fraternelle – avec Cypris Kophidès ( Diabase, 2013)
- A ciel ouvert - avec Jacques Darras(La passe du vent, 2010)
- Toute vie finit dans la nuit - avec Claude Vigée (Parole et Silence, 2007)
- Fragments du Royaume - avec Michel le Bris (La passe du vent, 2000)
A Lannion où il vit, il crée, en 1992, les rencontres intitulées « Il fait un temps de poème ». Etonnant voyageur, il travaille au festival du même nom et de Saint-Malo à Bamako, de Sarajevo à São Paulo, il se fait le passeur des poètes et des écrivains. En 1997, il y crée un espace poésie. De 2006 à 2008, il a publié une chronique hebdomadaire dans le journal Ouest-France : « Le tour du monde en 80 poèmes ». Ses textes, livres ou anthologies, sont traduits dans une quinzaine de langues.
Par ailleurs, depuis de nombreuses années, il travaille dans les écoles, avec les enfants.
PRINCIPAUX TITRES DISPONIBLES:
Récits, Nouvelles :
- Existence marginale, mais ne trouble pas l’ordre public ( Flammarion, 2012)
- Mes demeures en Bretagne ( Naïve , 2012)
- Besoin de poème : lettre à mon père (Seuil, 2006)
- Le château sous le ciel ( photographies Yvon Le Marlec) Filigranes 2005
- On est sérieux quand on a dix-sept ans (Flammarion, 1999)
- La clé de la chapelle est au café d’en face (Flammarion, 1997)
- Le petit tailleur de short (Flammarion, 1996)
Romans :
- Si tu me quittes, je m’en vais (Flammarion, 2009)
- Elle était une fois (Flammarion, 2003)
Poésie :
- En fin de droits ( illustrations de Pef) éditions Bruno Doucey 2014
- Il fait un temps de poème, tome 2 (Filigranes, Mars 2013)
- Sous le plafond des phrases ( Editions Bruno Doucey, 2013)
- A louer chambre vide pour personne seule ( Rougerie, 2011)
- Le point J ( illustrations Jeanne Frère) ( coédition Chant Manuel et Aedam Musicae , 2011)
- Le Tour du Monde en 80 poèmes (Flammarion, 2009)
- Vingt ans – Poèmes 1971 - 1976 (La Passe du Vent, 2009)
- Chambres d’écho ( Rougerie, 2008)
- Le loup et la lune (Rougerie, 2001)
- Le jardin des tempêtes (Flammarion, 2000)
- L’écho de la lumière (Rougerie, 1997)
Jeunesse :
-Douze mois et toi (Éditions Milan, 2005)
Entretiens :
- La langue fraternelle – avec Cypris Kophidès ( Diabase, 2013)
- A ciel ouvert - avec Jacques Darras(La passe du vent, 2010)
- Toute vie finit dans la nuit - avec Claude Vigée (Parole et Silence, 2007)
- Fragments du Royaume - avec Michel le Bris (La passe du vent, 2000)
EXTRAITS
Extrait de BESOIN DE POÈME Editions du Seuil
Donne-moi des livres
qui finissent bien
à défaut de romans
peut-être des poèmes
à défaut de poèmes
peut-être un quatrain
à défaut d’un quatrain
peut-être un seul vers.
Donne-moi un amour
qui finisse bien
le vôtre s’est échappé
le vôtre a laissé la porte ouverte
à ses fantômes
Tristan et Iseult
Roméo et Juliette
Henri et Yvonne
papa et maman
à jamais réunis
à jamais séparés.
Depuis quarante ans
j’essaie d’écrire une vie
qui finisse bien
depuis quarante ans
je suis mort quarante fois
je suis né quarante et une fois
depuis quarante ans
je suis couturé de séparations
je me réveille la nuit
au milieu d’une plaie
qui laisse chacun
de l’autre côté du sang.
Donne-moi des livres
qui finissent bien
L’Ile au trésor
Mais pas Docteur Jekill et Mister Hyde
Les Mutins de l’Elseneur
mais pas Vingt ans après
mais pas Madame Bovary
pas Le Rouge et le Noir
pas, comme son titre l’indique,
Illusions perdues
Les aventures de Hornblower
mais pas Moby Dick
Loin de la foule déchaînée
mais pas Jude l’obscur
ni de nombreux chefs-d’œuvre du XXe siècle
les Evangiles
mais pas le héros des Evangiles
ni de nombreuses vies du XXe siècle.
Laisse la page à sa blancheur
traverse-la
sans l’écrire
ne t’engage pas dans un vers
que tu regretterais
qui tuerait sur pied
les autres vers.
Laisse cette femme à son regard
n’ouvre pas
une histoire qui finira mal
un jour
elle mourra
te quittera
te laissera seul
devant l’immense nostalgie
de la seconde
d’avant la rencontre
quand il était possible
de vivre une histoire
qui finirait bien
ne finirait pas
comme ce vers de Gérald Neveu
la baigneuse file parallèle au désir
comme cet autre de Mallarmé
le transparent glacier des vols qui n’ont pas fui.
Je ne sais pas nager
mais je la suis
je ne comprends pas le vers de Mallarmé
mais je l’entends
comme j’ai entendu
le bruit court qu’on peut être heureux
et l’ai suivi.
Donne-moi un poème
qui ne commence
ni ne finit
donne-moi un poème.
***
Extrait de BESOIN DE POÈME Editions du Seuil
Poèmes Portugal
1 Dans le métro de Lisbonne
Son regard était tendu
comme un fil au-dessus du vide
ses yeux avançaient sur les pages
comme les pas du funambule
les phrases étaient autant de fils
qu’il aurait traversés
les mots pesaient sur la phrase
comme la barre sur les bras du funambule
le silence qu’il faisait en lisant
allait crever.
On aurait dit
que cet homme qui lisait
venait d’apprendre à lire.
2 Dans une rue de Lisbonne
Comme la pluie tombe
sur les tombes et sur les toits
sa voix brillait, brûlait
pleuvait, pleurait
de joie
de jouer sa joie
chaque soir
devant des passants qui ne passaient pas.
Sa voix qui chantait
désenchantait le monde
mais sa vie désenchantée
réenchantait nos vies
qui écoutaient son chant
par-dessus les langues et par-dessus les toits.
Il avait l’air vieux
mais il était jeune
il avait l’air pauvre
et il était pauvre
il chantait en fado
une chanson en français
où les filles ne viendraient pas.
Ses mains s’appuyaient sur ses mots
son âme sur notre âme
ses yeux sur les nôtres
et le temps d’une chanson
il s’élançait vers nous.
***
Extrait de BESOIN DE POÈME Editions du Seuil
Pourquoi n’ai-je pas pris une autre route, pourquoi n’ai-je pas cherché un travail normal, comme on disait, comme si écrire et dire des poèmes n’était pas un travail. J’aurais pu être…
Mais je ne voulais, pour rien au monde, changer de cap.
Peut-être parce que depuis ma sortie, mon évasion de la pension où je m’étais senti très malheureux, je ne voulais plus recevoir d’ordre de quiconque, sauf ceux que je me donnerais à moi- même. Sûrement parce que j’avais trouvé dans la poésie, la mienne et surtout celle des autres, une consolation, une énergie et une mise en forme de la vie, de ma vie. En ce temps, je naviguais entre deux titres : Le pays derrière le chagrin et A l’entrée du jour, le premier précédant heureusement le second. Personne n’aurait pu deviner dans les poèmes de A l’entrée du jour, sinon un vers par ci, un autre par là, le contexte de leur écriture : l’isolement de la maison dont le loyer était plus que modeste, l’état de son toit, de ses toilettes qui imperceptiblement s’écroulaient au milieu des bois et l’évacuation de ses eaux. Mêmes les rats prenaient la fuite.
Il ne m’était pas possible de parler de ma pauvreté en étant pauvre, il était salutaire de traquer la moindre trace de confort comme ce couteau à pain que j’achetai un jour de soldes. Grâce à ses dents et malgré l’humidité, je réussissais à me couper de belles tartines qui déclenchèrent ces deux vers :
On trouve toujours au fond d’un pain
une belle journée à partager.
Je mettais mes pages à l’école du ciel bleu. C’est ainsi que j’écrivais contre le malheur, c’est ainsi que je lisais même et surtout les livres désespérés dont les auteurs avaient eu, au moins, le courage d’achever leurs livres.
Donne-moi des livres
qui finissent bien
à défaut de romans
peut-être des poèmes
à défaut de poèmes
peut-être un quatrain
à défaut d’un quatrain
peut-être un seul vers.
Donne-moi un amour
qui finisse bien
le vôtre s’est échappé
le vôtre a laissé la porte ouverte
à ses fantômes
Tristan et Iseult
Roméo et Juliette
Henri et Yvonne
papa et maman
à jamais réunis
à jamais séparés.
Depuis quarante ans
j’essaie d’écrire une vie
qui finisse bien
depuis quarante ans
je suis mort quarante fois
je suis né quarante et une fois
depuis quarante ans
je suis couturé de séparations
je me réveille la nuit
au milieu d’une plaie
qui laisse chacun
de l’autre côté du sang.
Donne-moi des livres
qui finissent bien
L’Ile au trésor
Mais pas Docteur Jekill et Mister Hyde
Les Mutins de l’Elseneur
mais pas Vingt ans après
mais pas Madame Bovary
pas Le Rouge et le Noir
pas, comme son titre l’indique,
Illusions perdues
Les aventures de Hornblower
mais pas Moby Dick
Loin de la foule déchaînée
mais pas Jude l’obscur
ni de nombreux chefs-d’œuvre du XXe siècle
les Evangiles
mais pas le héros des Evangiles
ni de nombreuses vies du XXe siècle.
Laisse la page à sa blancheur
traverse-la
sans l’écrire
ne t’engage pas dans un vers
que tu regretterais
qui tuerait sur pied
les autres vers.
Laisse cette femme à son regard
n’ouvre pas
une histoire qui finira mal
un jour
elle mourra
te quittera
te laissera seul
devant l’immense nostalgie
de la seconde
d’avant la rencontre
quand il était possible
de vivre une histoire
qui finirait bien
ne finirait pas
comme ce vers de Gérald Neveu
la baigneuse file parallèle au désir
comme cet autre de Mallarmé
le transparent glacier des vols qui n’ont pas fui.
Je ne sais pas nager
mais je la suis
je ne comprends pas le vers de Mallarmé
mais je l’entends
comme j’ai entendu
le bruit court qu’on peut être heureux
et l’ai suivi.
Donne-moi un poème
qui ne commence
ni ne finit
donne-moi un poème.
***
Extrait de BESOIN DE POÈME Editions du Seuil
Poèmes Portugal
1 Dans le métro de Lisbonne
Son regard était tendu
comme un fil au-dessus du vide
ses yeux avançaient sur les pages
comme les pas du funambule
les phrases étaient autant de fils
qu’il aurait traversés
les mots pesaient sur la phrase
comme la barre sur les bras du funambule
le silence qu’il faisait en lisant
allait crever.
On aurait dit
que cet homme qui lisait
venait d’apprendre à lire.
2 Dans une rue de Lisbonne
Comme la pluie tombe
sur les tombes et sur les toits
sa voix brillait, brûlait
pleuvait, pleurait
de joie
de jouer sa joie
chaque soir
devant des passants qui ne passaient pas.
Sa voix qui chantait
désenchantait le monde
mais sa vie désenchantée
réenchantait nos vies
qui écoutaient son chant
par-dessus les langues et par-dessus les toits.
Il avait l’air vieux
mais il était jeune
il avait l’air pauvre
et il était pauvre
il chantait en fado
une chanson en français
où les filles ne viendraient pas.
Ses mains s’appuyaient sur ses mots
son âme sur notre âme
ses yeux sur les nôtres
et le temps d’une chanson
il s’élançait vers nous.
***
Extrait de BESOIN DE POÈME Editions du Seuil
Pourquoi n’ai-je pas pris une autre route, pourquoi n’ai-je pas cherché un travail normal, comme on disait, comme si écrire et dire des poèmes n’était pas un travail. J’aurais pu être…
Mais je ne voulais, pour rien au monde, changer de cap.
Peut-être parce que depuis ma sortie, mon évasion de la pension où je m’étais senti très malheureux, je ne voulais plus recevoir d’ordre de quiconque, sauf ceux que je me donnerais à moi- même. Sûrement parce que j’avais trouvé dans la poésie, la mienne et surtout celle des autres, une consolation, une énergie et une mise en forme de la vie, de ma vie. En ce temps, je naviguais entre deux titres : Le pays derrière le chagrin et A l’entrée du jour, le premier précédant heureusement le second. Personne n’aurait pu deviner dans les poèmes de A l’entrée du jour, sinon un vers par ci, un autre par là, le contexte de leur écriture : l’isolement de la maison dont le loyer était plus que modeste, l’état de son toit, de ses toilettes qui imperceptiblement s’écroulaient au milieu des bois et l’évacuation de ses eaux. Mêmes les rats prenaient la fuite.
Il ne m’était pas possible de parler de ma pauvreté en étant pauvre, il était salutaire de traquer la moindre trace de confort comme ce couteau à pain que j’achetai un jour de soldes. Grâce à ses dents et malgré l’humidité, je réussissais à me couper de belles tartines qui déclenchèrent ces deux vers :
On trouve toujours au fond d’un pain
une belle journée à partager.
Je mettais mes pages à l’école du ciel bleu. C’est ainsi que j’écrivais contre le malheur, c’est ainsi que je lisais même et surtout les livres désespérés dont les auteurs avaient eu, au moins, le courage d’achever leurs livres.