BIOBIBLIOGRAPHIE
Professeur émérite à la Sorbonne, elle est l'auteur d'essais et d'éditions commentées sur la fin du XIXe siècle et sur la poésie contemporaine. En particulier, quatre livres sur Paris chez les écrivains, de 1870 à nos jours. Le dernier: Paris chez les écrivains français depuis 1945, La Différence, 2006.
Poèmes:
Mais, Vodaine, 1967- Projets alternés, Rougerie, 1972
-Mains dissoutes, Rougerie, 1975-Cherche-terre, Saint-Germain des prés, 1977
-Mémoire d'abolie, Belfond 1978 -Habiter le sel, Pierre Dalle Nogare, 1979 -Partition, Belfond, 1981-Votre visage jusqu'à l'os, Temps Actuels, 1983
-Opportunité des oiseaux, Belfond, 1986- Opéra des limites, José Corti , 1988
-Végétales, Les cahiers du Confluent, 1988-Sans lieu sinon l'attente, Obsidiane, 1991
-Dans le feuilletage de la terre, Belfond, 1993
-Énigmatiques , Obsidiane,1995-La vie, lieu-dit, Obsidiane1997, coédition/Noroît
- La paix saignée, précédé de Contrées du corps natal, Obsidiane, 1999 (réédition 2004).
-Rituel d'emportement, anthologie personnelle de poèmes, suivie d'un long inédit, "Qui voyage le soir", Le Temps qu'il fait /Obsidiane, 2002
- Anamorphoses, Écrits des Forges (Québec), 2003
– Avec la mort, quartier d'orange entre les dents, Obsidiane, 2005.
- Verticale du secret, Obsidiane, 2007.
- Terre Énergumène, Le Castor Astral, 2009.
- Entre marge et présence, Écrits du Nord / Henry, 2009.
- Explorer l’incertain, L’Amourier, 2010.
- Violente vie, Le Castor Astral, 2012.
- Mots de passe, Le Castor Astral, 2014.
- Tracé du vivant, Arfuyen, 2016.
- Qui vient de loin, Le Castor Astral, 2016.
- Figures de la terre, Phi, 2017.
- Terre énergumène, suivi de Dans le feuillage de la terre
et Verticale du secret, Poésie / Gallimard, 2019.
Poèmes, éditions d'art numérotées: sur papiers du graveur Marc Pessin: Voix, 1979; Mouvantes, 1991 - avec eaux - fortes de Jean-Louis Viard, Signes d'alphabet, aux éditions Manière noire, 1998 - avec gravures de Gérard Serée, Peut-être Qui, Nice/Paris 2005 – avec peintures d'Augusta de Schucani et musique originale d'Alain Bancquart, Qui rature l'imprévisible, 2005- avec peintures et collages de Jean-Pierre Thomas,"Eventails" , 2006 et en cours.
Une dizaine d' oeuvres en collaboration avec Alain Bancquart, son mari, compositeur, à l'étranger et en France . La dernière, Le livre du Labyrinthe, a été exécutée à Radio-France, en 2000. Un disque en est paru en 2003 aux éditions Mode Records, New York, U.SA (mode@mode.com).
Prix de poésie : prix Max Jacob, prix Alfred de Vigny, prix Supervielle, grand prix d'automne de la Société des gens de Lettres, prix Kowalski-ville de Lyon, prix Verlaine de l'Académie française.
Membre des jurys des prix Apollinaire , Max-Pol Fouchet,Ivan Goll, et de divers prix annuels. Très nombreuses lectures en France et à l'étranger, émissions à la radio.
Sur elle: le livre A la voix de Marie-Claire Bancquart (1996, éditions du Cherche-Midi), la revue La Sape , Marie-Claire Bancquart( déc. 1998) , la revue Autre Sud , Marie-Claire Bancquart( juin 2000), la revue Nu(e) , Marie-Claire Bancquart (janvier 2001), la revue Friches , Marie-Claire Bancquart, printemps 2005, Poésie 2002 (octobre 2002). Des entretiens: dans la revue Poésie 2002, octobre 2002, p. 86-93; dans la revue Le Nouveau Recueil, mars-mai 2003, p. 162-172; dans la revue Sabord(Trois-Rivières, Québec), 2004, p. 61-63; dans la revue Arabesques (février 2006); un chapitre, p. 91-103, dans le livre de Monique W. Labidoire, S'aventurer avec Guillevic, Editinter, 2006.
Marie- Bancquart est décédée le 19 février 2019
.
Poèmes:
Mais, Vodaine, 1967- Projets alternés, Rougerie, 1972
-Mains dissoutes, Rougerie, 1975-Cherche-terre, Saint-Germain des prés, 1977
-Mémoire d'abolie, Belfond 1978 -Habiter le sel, Pierre Dalle Nogare, 1979 -Partition, Belfond, 1981-Votre visage jusqu'à l'os, Temps Actuels, 1983
-Opportunité des oiseaux, Belfond, 1986- Opéra des limites, José Corti , 1988
-Végétales, Les cahiers du Confluent, 1988-Sans lieu sinon l'attente, Obsidiane, 1991
-Dans le feuilletage de la terre, Belfond, 1993
-Énigmatiques , Obsidiane,1995-La vie, lieu-dit, Obsidiane1997, coédition/Noroît
- La paix saignée, précédé de Contrées du corps natal, Obsidiane, 1999 (réédition 2004).
-Rituel d'emportement, anthologie personnelle de poèmes, suivie d'un long inédit, "Qui voyage le soir", Le Temps qu'il fait /Obsidiane, 2002
- Anamorphoses, Écrits des Forges (Québec), 2003
– Avec la mort, quartier d'orange entre les dents, Obsidiane, 2005.
- Verticale du secret, Obsidiane, 2007.
- Terre Énergumène, Le Castor Astral, 2009.
- Entre marge et présence, Écrits du Nord / Henry, 2009.
- Explorer l’incertain, L’Amourier, 2010.
- Violente vie, Le Castor Astral, 2012.
- Mots de passe, Le Castor Astral, 2014.
- Tracé du vivant, Arfuyen, 2016.
- Qui vient de loin, Le Castor Astral, 2016.
- Figures de la terre, Phi, 2017.
- Terre énergumène, suivi de Dans le feuillage de la terre
et Verticale du secret, Poésie / Gallimard, 2019.
Poèmes, éditions d'art numérotées: sur papiers du graveur Marc Pessin: Voix, 1979; Mouvantes, 1991 - avec eaux - fortes de Jean-Louis Viard, Signes d'alphabet, aux éditions Manière noire, 1998 - avec gravures de Gérard Serée, Peut-être Qui, Nice/Paris 2005 – avec peintures d'Augusta de Schucani et musique originale d'Alain Bancquart, Qui rature l'imprévisible, 2005- avec peintures et collages de Jean-Pierre Thomas,"Eventails" , 2006 et en cours.
Une dizaine d' oeuvres en collaboration avec Alain Bancquart, son mari, compositeur, à l'étranger et en France . La dernière, Le livre du Labyrinthe, a été exécutée à Radio-France, en 2000. Un disque en est paru en 2003 aux éditions Mode Records, New York, U.SA (mode@mode.com).
Prix de poésie : prix Max Jacob, prix Alfred de Vigny, prix Supervielle, grand prix d'automne de la Société des gens de Lettres, prix Kowalski-ville de Lyon, prix Verlaine de l'Académie française.
Membre des jurys des prix Apollinaire , Max-Pol Fouchet,Ivan Goll, et de divers prix annuels. Très nombreuses lectures en France et à l'étranger, émissions à la radio.
Sur elle: le livre A la voix de Marie-Claire Bancquart (1996, éditions du Cherche-Midi), la revue La Sape , Marie-Claire Bancquart( déc. 1998) , la revue Autre Sud , Marie-Claire Bancquart( juin 2000), la revue Nu(e) , Marie-Claire Bancquart (janvier 2001), la revue Friches , Marie-Claire Bancquart, printemps 2005, Poésie 2002 (octobre 2002). Des entretiens: dans la revue Poésie 2002, octobre 2002, p. 86-93; dans la revue Le Nouveau Recueil, mars-mai 2003, p. 162-172; dans la revue Sabord(Trois-Rivières, Québec), 2004, p. 61-63; dans la revue Arabesques (février 2006); un chapitre, p. 91-103, dans le livre de Monique W. Labidoire, S'aventurer avec Guillevic, Editinter, 2006.
Marie- Bancquart est décédée le 19 février 2019
.
EXTRAITS
A force d'aller
A force d'aller
ma peau jetée sur les épaules
mes forces successives
empilées dans la main
mes yeux criblés
à quoi je ressemble?
A vous les non-finis
comme moi
entre tumeur de lait et pourriture.
Je vous interpelle
avec
les formes labourées de ma peur
je vous appelle
ayant ce soir
songé
fortement
à la mort
aussi je te caresse au nom des certitudes
que seul
nu
en face de moi
tu étendis contre le froid des choses.
L'amour grand terrible champ critique, planté d'herbes et de lauriers, semé de fruits aux couleurs violentes. Quand on pénètre, il fait autrement soleil. Les feuilles semblent chantournées. On sent une poussée verticale, on perd son dedans. On est immortel.
Prolonger le séjour ne serait pas possible.
(Partition, Belfond, 1981)
Ailleurs
Ailleurs
commence à nos muqueuses en reptations incontrôlables.
Notre intime est toujours un peu décalé.
Même lécher le sel eu creux du coude:
moi au passé qui eut chaud, transpira
se boit lointain comme une mer.
Un fragment d'invisible
mûrit
jumeau inclus dans notre corps
(Sans lieu sinon l'attente, Obsidiane, 1991)
Un blason de corps masculin
/…/Aggraver avec des caresses
la nudité d'un corps
A l'outre-minute
rien ne pourrait être cousu.
Un territoire entre deux seuils
une île non greffée sur l'obscur de nos muscles.
Comme un cri
n'appartient plus aux lèvres.
En te cherchant au monde
j'ai suscité l'objet à molécule supplémentaire
l'herbe lourde
l'aube la mésange lourdes
(Mémoire d'abolie, 1978)
Chat
Dressé
debout
patte en avant
dans le vide
le chat griffe une âme
qui passait dans la pièce.
(Anamorphoses, Écrits des Forges, 2003)
Hors
Infinitive et douce
parole de forêt
vendange des sucs dans la terre.
Entre résine et sang
le soleil attendri des feuilles
filtre un long rêve sur ces verbes
dont on chuchote
sans passé ni futur
un acte sans défaut:
boire
vivre
joindre son corps aux aiguilles de pin.
Couché à moitié hors de soi
on est une seconde d'arbre heureux.
(Opéra des limites, Corti, 1988)
Durant le temps déjà long que j'écris des poèmes, vous me demandez quelle a été l'évolution du sens? D'un côté, petite en apparence. Énigmes de la mort et de l'amour; attachement au monde dans ses petites choses si évidemment reliées au grand jeu de l'univers; sentiment que l'intérieur de mon corps, qui est moi pourtant, m'est étranger parce que je ne peux pas le contrôler ni le connaître, mais qu'il me réunit au reste du monde. Cela revient, mais s'approfondit .Les mots nous travaillent autant que nous les travaillons. Alors que j'avais l'impression de ne pas avoir de lieu où me situer, ils m'en ont donné un: mes titres vont de Mémoire d'abolie à Contrées du corps natal et Avec la mort . Une inquiétude pourtant, qui n'a jamais été absente, mais en filigrane, dans mes poèmes, est "sortie" brusquement au moment de la guerre du Kosovo, et ne fait que s'accentuer depuis: c'est la constante de la violence dans le monde. La paix saignée s'est juxtaposée à Contrées du corps natal.
…Tu retiens ton souffle. Tu te souviens du temps de guerre
dans ton enfance. Maisons ouvertes
sur des cicatrices de meubles.
La paix signée, tu traversais en train
la moitié de l'Europe, qui dressait des moignons de murs sans frontières.
pas d'autre paysage
que cette colère en ruines. Pas de dieu
sinon ces lares suppliciés, qui reviennent ici
chuchotant que la blessure
veille toujours à vif, dans le ciel
prête à descendre vers les hommes.
La paix
saignée.
Les choses de ce côté ne se sont pas améliorées…
Petit fait divers de la guerre
Avec ses propres cheveux
on l'a étranglée
sa natte
on l'a coupée dans une soupe
on a forcé sa sœur à la manger
maintenant, à l'hôpital, elle la sent comme une avoine brûlante
dans son intérieur, qui n'est plus estomac, intestins,
mais une place sans parois
entièrement ouverte
à la brutalité des hommes.
Démonstrative. (Avec la mort, quartier d'orange entre les dents, 2005)
Ce la m'a amenée à considérer l'espèce de malédiction fondamentale qui pèse dans les mythologies (y compris chrétienne: je ne suis pas croyante) sur des personnages comme Cassandre, Caïn, Judas.
/../ Braconnages de révolte. Où, sinon
dans les plus étroites rues de Paris que brûle l'été?
Elles débouchent sur une pauvre boulangerie juive
(pains azymes, gâteaux au cumin)
Station Saint-Paul, un kiosque expose
ses feuilles entre le tronc des arbres.
Titres: meurtres, violences, trahison,
sans que personne prenne garde à ces comptines.
Salut, père Caïn, père Judas
prolifiques
mais
notre aventure a descendu beaucoup d'étages.
Encore vaut-il mieux, seul, grommeler la mort
qui ne manquera pas sa planque, au bout de quelque rue,
dans le quartier où s'est pendu Nerval.(Anamorphoses).
Mais , mais…
Irais-je oublier le sadisme du monde les corps
tourmentés
comme voici quarante, soixante ans, des millénaires?
mais vous ignorerais-je
mots rutilants, sexe, caresse, pleurs au milieu du désir?
Non. Que je ne mange
nulle cendre d’oubli
au milieu des profanations, des agonisants
non séparables
de la musique et de l’olive douce
dans notre destin double-face (inédit)
*
C’est bien toi, cher corps, chères paroles.
C’est bien le monde,
aussi perdu que jamais de folie.
Nous avons vieilli
divorçant chaque jour d’avec
notre visage de la veille
peu à peu des pays ont fait amitié avec nous
nous avons déchiffré d’anciennes écritures sur les pierres
le monde s’est
arrondi
plus tendrement
il a pris son temps
pour nous prêter la pierre et la lune
et nous conduire vers
une surabondance onirique. (inédit)
*
Voici vingt ou trente siècles
un poète mon frère
regardait l’ insecte minuscule
cheminant le long de son bras.
Il s’étonnait avec violence
d’être là, au monde, en même temps que lui
dans un pli commun des immenses
combinaisons de l’univers. (inédit)
Attentats, guerres, soleils en délire,
non loin brûlaient des villes.
Par hasard épargnés, par hasard ensemble,
entre les lignes
de l’inexorable
duraient le poète et la bête. (inédit)
A force d'aller
ma peau jetée sur les épaules
mes forces successives
empilées dans la main
mes yeux criblés
à quoi je ressemble?
A vous les non-finis
comme moi
entre tumeur de lait et pourriture.
Je vous interpelle
avec
les formes labourées de ma peur
je vous appelle
ayant ce soir
songé
fortement
à la mort
aussi je te caresse au nom des certitudes
que seul
nu
en face de moi
tu étendis contre le froid des choses.
L'amour grand terrible champ critique, planté d'herbes et de lauriers, semé de fruits aux couleurs violentes. Quand on pénètre, il fait autrement soleil. Les feuilles semblent chantournées. On sent une poussée verticale, on perd son dedans. On est immortel.
Prolonger le séjour ne serait pas possible.
(Partition, Belfond, 1981)
Ailleurs
Ailleurs
commence à nos muqueuses en reptations incontrôlables.
Notre intime est toujours un peu décalé.
Même lécher le sel eu creux du coude:
moi au passé qui eut chaud, transpira
se boit lointain comme une mer.
Un fragment d'invisible
mûrit
jumeau inclus dans notre corps
(Sans lieu sinon l'attente, Obsidiane, 1991)
Un blason de corps masculin
/…/Aggraver avec des caresses
la nudité d'un corps
A l'outre-minute
rien ne pourrait être cousu.
Un territoire entre deux seuils
une île non greffée sur l'obscur de nos muscles.
Comme un cri
n'appartient plus aux lèvres.
En te cherchant au monde
j'ai suscité l'objet à molécule supplémentaire
l'herbe lourde
l'aube la mésange lourdes
(Mémoire d'abolie, 1978)
Chat
Dressé
debout
patte en avant
dans le vide
le chat griffe une âme
qui passait dans la pièce.
(Anamorphoses, Écrits des Forges, 2003)
Hors
Infinitive et douce
parole de forêt
vendange des sucs dans la terre.
Entre résine et sang
le soleil attendri des feuilles
filtre un long rêve sur ces verbes
dont on chuchote
sans passé ni futur
un acte sans défaut:
boire
vivre
joindre son corps aux aiguilles de pin.
Couché à moitié hors de soi
on est une seconde d'arbre heureux.
(Opéra des limites, Corti, 1988)
Durant le temps déjà long que j'écris des poèmes, vous me demandez quelle a été l'évolution du sens? D'un côté, petite en apparence. Énigmes de la mort et de l'amour; attachement au monde dans ses petites choses si évidemment reliées au grand jeu de l'univers; sentiment que l'intérieur de mon corps, qui est moi pourtant, m'est étranger parce que je ne peux pas le contrôler ni le connaître, mais qu'il me réunit au reste du monde. Cela revient, mais s'approfondit .Les mots nous travaillent autant que nous les travaillons. Alors que j'avais l'impression de ne pas avoir de lieu où me situer, ils m'en ont donné un: mes titres vont de Mémoire d'abolie à Contrées du corps natal et Avec la mort . Une inquiétude pourtant, qui n'a jamais été absente, mais en filigrane, dans mes poèmes, est "sortie" brusquement au moment de la guerre du Kosovo, et ne fait que s'accentuer depuis: c'est la constante de la violence dans le monde. La paix saignée s'est juxtaposée à Contrées du corps natal.
…Tu retiens ton souffle. Tu te souviens du temps de guerre
dans ton enfance. Maisons ouvertes
sur des cicatrices de meubles.
La paix signée, tu traversais en train
la moitié de l'Europe, qui dressait des moignons de murs sans frontières.
pas d'autre paysage
que cette colère en ruines. Pas de dieu
sinon ces lares suppliciés, qui reviennent ici
chuchotant que la blessure
veille toujours à vif, dans le ciel
prête à descendre vers les hommes.
La paix
saignée.
Les choses de ce côté ne se sont pas améliorées…
Petit fait divers de la guerre
Avec ses propres cheveux
on l'a étranglée
sa natte
on l'a coupée dans une soupe
on a forcé sa sœur à la manger
maintenant, à l'hôpital, elle la sent comme une avoine brûlante
dans son intérieur, qui n'est plus estomac, intestins,
mais une place sans parois
entièrement ouverte
à la brutalité des hommes.
Démonstrative. (Avec la mort, quartier d'orange entre les dents, 2005)
Ce la m'a amenée à considérer l'espèce de malédiction fondamentale qui pèse dans les mythologies (y compris chrétienne: je ne suis pas croyante) sur des personnages comme Cassandre, Caïn, Judas.
/../ Braconnages de révolte. Où, sinon
dans les plus étroites rues de Paris que brûle l'été?
Elles débouchent sur une pauvre boulangerie juive
(pains azymes, gâteaux au cumin)
Station Saint-Paul, un kiosque expose
ses feuilles entre le tronc des arbres.
Titres: meurtres, violences, trahison,
sans que personne prenne garde à ces comptines.
Salut, père Caïn, père Judas
prolifiques
mais
notre aventure a descendu beaucoup d'étages.
Encore vaut-il mieux, seul, grommeler la mort
qui ne manquera pas sa planque, au bout de quelque rue,
dans le quartier où s'est pendu Nerval.(Anamorphoses).
Mais , mais…
Irais-je oublier le sadisme du monde les corps
tourmentés
comme voici quarante, soixante ans, des millénaires?
mais vous ignorerais-je
mots rutilants, sexe, caresse, pleurs au milieu du désir?
Non. Que je ne mange
nulle cendre d’oubli
au milieu des profanations, des agonisants
non séparables
de la musique et de l’olive douce
dans notre destin double-face (inédit)
*
C’est bien toi, cher corps, chères paroles.
C’est bien le monde,
aussi perdu que jamais de folie.
Nous avons vieilli
divorçant chaque jour d’avec
notre visage de la veille
peu à peu des pays ont fait amitié avec nous
nous avons déchiffré d’anciennes écritures sur les pierres
le monde s’est
arrondi
plus tendrement
il a pris son temps
pour nous prêter la pierre et la lune
et nous conduire vers
une surabondance onirique. (inédit)
*
Voici vingt ou trente siècles
un poète mon frère
regardait l’ insecte minuscule
cheminant le long de son bras.
Il s’étonnait avec violence
d’être là, au monde, en même temps que lui
dans un pli commun des immenses
combinaisons de l’univers. (inédit)
Attentats, guerres, soleils en délire,
non loin brûlaient des villes.
Par hasard épargnés, par hasard ensemble,
entre les lignes
de l’inexorable
duraient le poète et la bête. (inédit)